• punir

    N°185

    Didier Fassinpunir

    Seuil 2017                       

    201 pages                                                                  

    La France traverse la période la plus répressive de son histoire récente en temps de paix. Si l’on fait exception, en effet, des années qui ont immédiatement suivi la Seconde Guerre mondiale, jamais autant d’hommes et de femmes n’y ont été emprisonnés. C’est sur ce constat que D. Fassin commence son essai.

    Après ce constat, détaillé à l’aide de données statistiques, il se penche, d’un point de vie sociologique et philosophique, sur les questions suivantes : qu’est-ce que punir ? pourquoi punit-on ? qui punit-on ?

    A la première question, il discute les concepts de châtiments et de vengeance pour conclure que les raisons pour infliger une punition sont très imprécises et restent floues, sauf celle de l’infliction d’une souffrance, et il en vient à la seconde question : comment justifier l’infliction d’une telle souffrance ?

    En s’appuyant sur des exemples précis, D. Fassin explique que la punition répond autant à l’administration du droit de façon à ce qu’un coupable paye la dette qu’il a vis-à-vis de la société, qu’à une dimension irrationnelle du châtiment liée aux pulsions de cruauté, au plaisir de faire souffrir.

    Finalement, il s’intéresse au « qui punit-on » pour faire une analyse plus politique et démontrer que la distribution des châtiments contribue à aggraver et perpétuer les disparités sociales en affectant de façon disproportionnée les segments les plus défavorisés. Il finit par une conclusion très forte remettant en cause complétement les pratiques actuelles de la justice (extrait ci-dessous).

    Non exhaustive en termes d’exemples, puisque cette analyse repose principalement sur des exemples français et américains, et bien que très savante et écrite dans un langage « sciences sociales », punir est une lecture relativement aisée, passionnante, très prenante et qui fait beaucoup réfléchir sur la période que nous traversons.

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    Extrait:

    Punir, disent les philosophes et les juristes, c'est corriger un mal, réparer un préjudice, réformer un coupable, protéger la société. La légitimité ultime du châtiment devrait ainsi être la restauration d'un ordre social juste que le fait incriminé avait menacé. Or, si le châtiment n'est pas ce que l'on dit qu'il est, s'il n'est pas justifié par les raisons que l'on croit, s'il favorise la réitération des infractions, s'il puni en excès de l'acte commis, s'il sanctionne en fonction du statut des coupables plus que de la gravité de l'infraction, s’il vise avant tout des catégories préalablement définies comme punissables et s’il contribue à produire et reproduire des disparités, alors ne devient-il pas plutôt ce qui menacent l'ordre social ? – et ne faut-il pas, dans ce cas, le repenser, non plus seulement dans le langage idéal de la philosophie et du droit, mais aussi et surtout dans la réalité inconfortable de l’inégalité sociale et de la violence politique ?

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    Eléments biographiques :

    punirDidier Fassin est né en 1955. Il est anthropologue, sociologue et médecin. Il est professeur de sciences sociales à l'Institute for Advanced Study de l'université de Princeton, directeur d’études à l'École des hautes études en sciences sociales et professeur honoraire é l’Université de HongKong. Ses recherches ont d’abord porté sur les questions de santé puis se sont orientées vers les enjeux politiques et moraux des sociétés contemporaines. Il a été administrateur puis vice-président de Médecins sans frontières de 1999 à 2003, il est devenu en 2006 le président du Comede, Comité pour la santé des exilés, organisation non gouvernementale qui assure la prise en charge médicale, sociale et juridique des migrants et des réfugiés. Il a publié dix livres et de nombreux articles.


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