• Les Enfants de Venise

    N°333

    Luca Di FulvioLes Enfants de Venise

    La ragazza che toccava il cielo

    Traduit de l’italien par Françoise Brun

    2013, Slatkine & Co 2017, Pocket 2019

    988 pages

    L’action se passe pendant la Renaissance, au début du XVIème siècle. Un groupe d’adolescents orphelins détrousse les passants dans les ruelles de Rome. Mais un de leurs méfaits tourne mal et ils sont contraints de s’enfuir. Ils trouvent refuge à Venise. Dans l’entrelacs des canaux et des placettes, ils découvrent la ville, ses voleurs, ses nobles, son clergé et son petit peuple. Très vite, chacun trouve sa voie, mais leurs destins continuent de se croiser.

    Les Enfants de Venise est un pur roman d’aventure. L. Di Fulvio se régale dans les descriptions de la Rome et de la Venise du XVIème siècle, du quartier de l’Angelo aux rives du Tibre en passant par la Porta del Popolo, du Ghetto à l’Arsenal en passant par le Pont du Rialto et la Piazza San Marco. Plus attiré par le monde des bas-fonds que par la vie mondaine, il mène son histoire dans les quartiers pauvres de Venise, celui des Juifs ou celui des prostituées où la misère et l’insalubrité règnent. Ses quatre personnages principaux sont beaux, vifs et sensibles, même s’ils ont aussi leurs défauts. Ils sont attachants. Il les entoure d’une galerie de personnages hauts en couleur : un capitaine de l‘armée de retour de Marignan, un moine antisémite hystérique, un bandit violent au grand cœur, un noble pervers et difforme, un juif faux médecin, … Il crée un monde ancré dans l’histoire et teinté d’irréalité.

    Il y a de la poésie dans les aventures des Enfants de Venise, malgré la violence et les conditions de vie sordides des classes les plus pauvres de cette époque, quand la vie ne valait pas grand-chose. Ses personnages sont bienveillants et empathiques, même si conditions dans lesquelles ils vivent les poussent à mentir, voler, et tuer, ils s’en sortent toujours vers le meilleur, et la morale est sauve.

    Les Enfants de Venise est un roman d’aventures historique, mais c’est aussi une ode à l’amitié, à la fidélité et à la reconnaissance, et à l’amour. L. Di Fulvio écrit dans un style simple et efficace, il sait manier le suspense et les rebondissements, et la lecture des presque mille pages de son roman est un agréable, palpitant et très divertissant voyage.

    .....

    Eléments biographiques :

    Luca Di Fulvio est né en 1957 à Rome. Il est d’abord acteur de théâtre, scénariste et consultant pour des maisons d’édition. Il fonde ensuite sa propre compagnie de théâtre (Moveable Feast). Il publie un premier roman en 1996. Il connait du succès et ses textes sont adaptés au cinéma. Il a écrit 10 romans et un livre pour la jeunesse.

     

    Extraits :

     Mercurio descendit du bateau à Mestre ;

    « Qu'est-ce que je dois dire à Scarabello ? lui demanda le borgne, qui l’avait amené jusque-là. Tu seras où ?

    - C'est moi qui reprendrai contact, répondit Mercurio, en s'éloignant.

    - Scarabello, il va pas aimer.

    - Rien à foutre », dit Mercurio sans se retourner. Il accéléra le pas, pressé de disparaître. En un instant le brouillard qui montait l’engloutit.

    « Mercurio ! » cria le Borgne.

    Le garçon se retourna : il ne voyait plus ni le borgne ni la barque, et fut soulagé. Il prit une ruelle où il se rappelait avoir vu une petite statue de la Vierge, continua sur une vingtaine de pas puis trouva la rue qu'il cherchait. Sur sa gauche, là où le brouillard était plus épais, il entendait clapoter le canal. Le mur irrégulier de joncs qui croissait sur la rive atténuait le bruit de l'eau. Sur sa droite, tous les cinquante pas émergeait du brouillard une chaumine, basse et trapue. Il en passa sept.

    Arrivé devant la huitième, il eut une hésitation, ralentit et finalement s'arrêta. Son souffle se condensait devant son visage et se confondait avec le brouillard. Il faisait nuit maintenant. Il s'approcha de la maison, jeta un coup d’œil entre les volets. À l'intérieur tout était éteint. Il eut peur. Se sentit perdu.

    La porte était seulement tirée. Mercurio eut un mauvais pressentiment. Il la poussa, doucement.

    .....

    Mercurio resta bouche bée en se retrouvant devant l'accumulation d'édifices la plus improbable qui soit, avec des constructions hautes comme des tours accolées les unes aux autres sans aucune logique.

    « Voilà le Castelletto », lui dit le gamin qui l'avait guidé jusque-làMercurio lui donna un marquet et observa les alentours. La cour au milieu des Tours était emplie d'une foule incroyable de femmes de tous âges, des petites filles aux femmes mûres, le visage fardé de blanc de céruse et les lèvres rouges. Toutes portaient des robes voyantes et décolletées, et un foulard jaune autour du cou. Certaines, en passant près de lui, lui firent des signes obscènes avec leur langue, l'une d'elles releva ses jupes et agita devant lui son cul rond d'un blanc crémeux, avant de s'éloigner en se déhanchant.

    « T'as juste l’embarras du choix, dit en riant un homme qui sortait d'une des Tours.

    - Je cherche le docteur Isacco da Negroponte, lui dit Mercurio.

    - Un docteur ? Ici ? T'es pas venu pour baiser ?


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